3 - Un café bien serré !
Dès le lendemain, Erika s'accoude au comptoir du café de la Tour. Accessoirement pour boire un café. Olivier n’est pas là. L'établissement, désert sous la torpeur de midi semble bouger le moins possible pour éviter la chaleur. Une fois sa tasse engloutie, Erika attend la prise de service d’Olivier. Comment l’aborder alors qu'elle n'a rien à lui dire, elle qui n’a jamais eu à draguer. Toutes ces années de paresse et d’ennui l’ont rendue passive et maladroite. Pourtant elle doit tenter. Deux autres cafés et une bière plus tard, elle n’a toujours rien tenté hormis quelques mimiques compulsives et un sourire incertain. Par contre cent filles au moins dont la majorité semblaient sortir d'un défilé de mannequin sont venues toucher le biceps d’Olivier, lui claquer des bises et lui jeter des rires flamboyants à la figure.
Une main bronzée s'aplatit sur le magazine qu'elle vient de refermer; il porte le plateau et le tablier à merveille. Son sourire, une arme de destruction massive. "Un autre verre?" Erika répond une banalité qui le fait hausser un sourcil. Le contact est établit. Il faudra 24 cafés et 17 bières avant qu’ils ne se retrouvent seuls après la fermeture, dans l’arrière boutique.
Seuls dans l’ambiguïté. Le silence
se fait, chacun pense à la même chose mais fait semblant de penser à
autre chose. Chacun espère que l’autre lui donnera le signal de départ.
Des heures peuvent s’écouler ainsi. Erika en donne un mais Olivier ne
le voit pas et en propose un moins subtil. Il l’attrape par le cou et
colle ses lèvres aux siennes. Ses mains s’évadent, explorent le monde
sur un ton faussement timide. Sa langue un peu râpeuse donne soif à
Erika qui saisit ce prétexte pour un peu de répit. Il est pressé, elle
aussi, et légèrement stressée en plus. Le silence est lourd et Erika
tente une amorce de discussion hors propos qu'Olivier éteint avec
astuce. Comme elle boit trop lentement son coca,
il l’embrasse entre deux gorgées. Enfin elle se décide à poser ses
mains sur lui et s’engage progressivement dans des contrées
inexplorées. Le temps s’arrête, elle se lance et oublie l'ennui. A sa
grande surprise Erika se sent à l’aise et se déshabille entièrement en
prenant des airs de femme accomplie. Elle semble assez détendue pour ne
pas lui préciser que c’est sa première fois. Dehors le feu d'artifice
s'éclate.
Le reste leur appartient, à eux, et au compartiment à glaces qui a su résister à leurs assauts désaccordés.